Questions et Réponses pour les entreprises qui signent la déclaration des entreprises de la COP15 pour une évaluation et une divulgation obligatoires

Qu’entend-on par « positif pour la nature  » ?

C’est un objectif mondial qui consiste à mettre fin à l’érosion de la nature et à l’inverser d’ici 2030. Il est mesuré par rapport à une base de référence de 2020, selon des critères d'amélioration de la santé, de l'abondance, de la diversité et de la résilience des espèces, des populations et des écosystèmes, de sorte qu’en 2030, il y ait davantage de nature qu’en 2020. Découvrez le mouvement « Positif pour la nature ».

Quand les exigences obligatoires seraient-elles mises en œuvre ?

Toutes les cibles du Cadre mondial pour la biodiversité de la Convention sur la diversité biologique après-2020 sont des cibles 2030. Cela signifie que les pays devront mettre en œuvre des obligations d'évaluation et de divulgation d’ici 2030. Toutefois, certains pays pourraient décider de la mettre en œuvre plus tôt, mais cette décision sera prise au niveau national par les différents gouvernements.

Comment l’adoption de l’évaluation et de la divulgation obligatoires de la Cible 15 serait-elle mise en œuvre ?

Cette cible mondiale sera mise en œuvre au niveau national. Cela signifie que chaque pays devra décider de la meilleure façon de mettre en œuvre ces exigences en fonction des réglementations existantes et du contexte national. Un cadre que les pays pourraient utiliser est le Cadre Taskforce on Nature-related Financial Disclosures (TNFD, Groupe de travail sur les informations financières liées à la nature) mais ils peuvent également décider d’utiliser différents cadres. Le TNFD fournit aux gouvernements un cadre clair permettant aux entreprises et aux institutions financières d’évaluer, de gérer et de divulguer les risques liés à la nature. Il ne crée pas un nouveau standard de divulgation, mais regroupe les meilleures normes, les meilleures données et les meilleurs outils pour les entreprises et les institutions financières. Il s’appuie sur le protocole sur le capital naturel et le cadre du Taskforce on Climate-relatedDisclosures (TCFD, Groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat). Une deuxième version du cadre a été publiée en juin 2022 et le cadre complet sera disponible en 2023.

Qu’entend-on par « grandes entreprises transnationales et institutions financières » ?

Une définition sera adoptée au niveau national par chaque pays. Sa formulation dépendra en grande partie des contextes nationaux. De nombreux pays ont déjà adopté une définition. Par exemple, la loi britannique sur les sociétés concernant la divulgation d’informations relatives au climat définit les grandes entreprises comme étant celles qui comptent plus de 500 employés et qui sont soit : des sociétés cotées sur le marché principal du LSE ; des sociétés négociées sur l’AIM ; des banques ou des assureurs ; ou des entreprises ayant un chiffre d’affaires supérieur à 500 millions de livres sterling. L’UE et l’OCDE considèrent que les grandes entreprises sont celles qui emploient 250 personnes ou plus et ont un chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 millions d’euros. Au Brésil, la banque publique de développement définit les grandes entreprises comme celles ayant un revenu brut supérieur à 300 millions R$ (environ 60 millions USD) ou plus de 250 employés. Le Japon a adopté une définition juridique des Petites et Moyennes Entreprises dans la loi de base sur les PME et toute entreprise ne répondant pas à cette définition est considérée comme une grande entreprise. En Chine, le Bureau National des Statistiques a promulgué une loi pour classer les grandes, moyennes, petites et microentreprises par secteur, en fonction du revenu, de l’effectif et du total des actifs.

Pourquoi l’évaluation et la divulgation des impacts sur la biodiversité et des dépendances à l’égard de cette dernière sont-elles dans l’intérêt des entreprises ?

Le fait que les sociétés et les institutions financières ne soient pas conscientes de leurs impacts et de leurs dépendances à l’égard de la biodiversité, et plus largement de la nature, constitue un risque fondamental pour les entreprises et la société en général. Si les entreprises n’ont pas une compréhension de leurs impacts et de leurs dépendances, elles ne seront pas en mesure de les gérer. Si elles ne les divulguent pas, il n’est alors pas possible d’assurer un suivi de leurs progrès. L’évaluation puis la divulgation de ces impacts et dépendances constituent une première étape essentielle pour aider les entreprises à comprendre les services écosystémiques qui soutiennent leurs activités et les raisons pour lesquelles elles doivent agir pour protéger, restaurer et utiliser durablement la nature. Elles pourront ainsi mieux hiérarchiser les actions pertinentes en fonction des problèmes les plus importants dans leurs opérations et leurs chaînes de valeur. Cela s’applique à toutes les entreprises, quelles que soient leur taille, leur situation géographique et leur secteur.   La divulgation offre également les avantages suivants aux entreprises :  

  • L’accès au marché. La divulgation est un élément essentiel au maintien de la compétitivité des entreprises sur les marchés mondiaux. Plusieurs marchés, tels que l’Union européenne et le Royaume-Uni sont en train d’adopter et de mettre en œuvre des réglementations exigeant une diligence raisonnable sur les importations de produits à risque forestier, ce qui obligera les entreprises à être en mesure d’identifier et de gérer les impacts sur l’environnement et les dépendances de ce dernier, si elles veulent opérer sur ces marchés. Les exportateurs devront faire face à des attentes plus élevées en matière de divulgation environnementale de la part des clients et des autorités sur ces marchés, entre autres.  La divulgation obligatoire permettra d’identifier les entreprises qui font actuellement preuve de leadership et incitera les entreprises à entamer la transition vers des modèles d’entreprise respectueux de la nature.

  • Un meilleur accès au capital. Au fur et à mesure que le nombre d’investisseurs s’engageant dans des actifs positifs pour la nature augmente, les entreprises qui ne communiquent pas de données sur la nature et la biodiversité seront confrontées à des contraintes d’accès au capital. Les entreprises qui communiquent des données conformes au TCFD par l’intermédiaire du CDP ont déjà un taux d’accès aux capitaux supérieur de 19 % à celui des entreprises non déclarantes. Cet avantage devrait prendre de l’importance au fur et à mesure que les indicateurs de biodiversité et de santé de la nature sont pris en compte dans les décisions d’investissement.

  • Une performance supérieure. En plus de garantir l’accès aux principaux marchés et sources de capitaux, les bonnes pratiques en matière de développement durable et de reporting profitent aux entreprises en améliorant la gestion du risque, les performances financières et l’engagement des employés et des clients.  Ces entreprises affichent généralement des rendements plus élevés et bénéficient d’une meilleure performance dans l’ensemble. Par exemple, les données STOXX indiquent que les entreprises figurant sur la Liste du CDP ont surpassé leurs concurrents de 5,3 % sur une période de sept ans.

Quelle est l’expérience acquise en matière de divulgation de l’information relative au climat ?

Alors que certaines juridictions[1] exigent déjà de certaines entreprises qu’elles divulguent des informations sur la manière dont elles opèrent et gèrent les questions sociales et environnementales, la plupart d’entre elles encouragent les entreprises à divulguer des informations sur la biodiversité au lieu de les obliger[2]. Cette absence d’exigence obligatoire entraîne une divulgation très variable, en termes de quantité et de qualité de l’information.

L’expérience acquise dans le cadre de l’agenda climatique nous montre que l’action volontaire ne suffit pas. C'est pourquoi les pays commencent à adopter des exigences obligatoires pour que les entreprises divulguent des informations financières liées au climat, sur la base des lignes directrices du Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD, Groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat). Des pays tels que le Royaume-Uni, le Canada et la Nouvelle-Zélande introduisent une nouvelle législation et établissent une feuille de route exigeant des entreprises qu’elles rendent compte de leurs impacts sur le climat et de leurs décisions d’investissement. Cette initiative fait suite aux accords conclus par les ministres des finances du G7 en juin 2021 pour rendre le TCFD obligatoire[3] et aux règles proposées par la U.S. Securities and Exchange Commission pour obliger les entreprises publiques à divulguer des informations détaillées relatives au climat[4].

En 2016, la France était l’un des premiers pays au monde à adopter une législation obligeant certaines institutions financières à rendre compte chaque année de leur exposition aux risques posés par le changement climatique et des actions qu’elles envisagent à cet égard. Cinq ans plus tard, il existe des preuves tangibles de l’impact de cette loi révolutionnaire. Selon la Banque de France, les stocks de combustibles fossiles ont chuté de 40 % chez les investisseurs institutionnels français par rapport aux stocks de ceux qui n’étaient pas soumis aux nouvelles règles. C'est la preuve que la divulgation obligatoire fonctionne et peut avoir des résultats immédiats.

Quels sont les avantages de la divulgation obligatoire pour les entreprises ? 

L’adoption d'exigences obligatoires en matière d’évaluation et de divulgation est nécessaire pour accélérer l’action et améliorer la compétitivité internationale. Il existe d’autres avantages, entre autres :

  • Mieux comprendre les risques et les opportunités liés à l’érosion de la nature ;

  • Uniformiser les règles du jeu à l’échelle mondiale et assurer une concurrence équitable ;

  • Assurer une action et une collaboration à grande échelle ;

  • Accélérer la normalisation ;

Améliorer les attentes, en permettant aux entreprises de planifier et d’intégrer les considérations plus facilement, car elles disposent d’un ensemble clair d'attentes en matière de déclaration ;

  • Accroître la responsabilité et la transparence pour améliorer la gouvernance des entreprises ;

  • Impliquer et activer les PME par le biais de leurs chaînes de valeur ;

  • Faciliter l’accès aux données.

Quels sont les avantages de la divulgation obligatoire pour la société ? 

Comme c’est le cas pour le changement climatique, des exigences obligatoires pour évaluer et divulguer les impacts sur la nature et les dépendances à l’égard de cette dernière sont nécessaires :

  • Accélérer l’action et renforcer l’argumentation pour investir dans la nature ;

  • Engager les investisseurs ;

  • Responsabiliser les consommateurs ;

  • Garantir les droits des peuples autochtones et des communautés locales.

Où puis-je trouver un complément d’informations ?

Pour plus d’informations sur les raisons pour lesquelles la divulgation obligatoire est dans l’intérêt des entreprises et de nos économies, consultez notre dernière position politique sur la Cible 15 du Cadre mondial pour la biodiversité. Les exigences obligatoires doivent être soutenues par des indicateurs solides et scientifiquement fondés que les entreprises peuvent utiliser et c’est exactement ce que proposent les cadres SBTN et TNFD. 

Vous pouvez également consulter le document  d’orientation politique du CDP sur l’importance de la divulgation obligatoire, qui met en évidence cinq éléments principaux d’une divulgation obligatoire de haute qualité que les décideurs doivent prendre en compte.  Par ailleurs, le CDP a produit récemment un document d’orientation politique sur la divulgation obligatoire d’information sur l’eau.

Comment les entreprises et les institutions financières peuvent-elles déjà évaluer leurs impacts et leurs dépendances ?

Pour mesurer, évaluer et hiérarchiser les impacts et les dépendances à l’égard de la nature et assurer des actions sur les plus importants d’entre eux, les entreprises et les institutions financières peuvent :

  1. Effectuer une évaluation initiale de leur importance afin de prioriser les efforts : Travailler sur les impacts sur la nature et les dépendances à l’égard de cette dernière en réalisant des évaluations d’importance relative sur l’ensemble des chaînes de valeur de production et de consommation : de l’extraction des matières premières aux déchets post-consommation. Grâce aux conseils du SBTN, les entreprises peuvent également identifier et gérer les impacts environnementaux, les dépendances et les lieux prioritaires. Par exemple, elles peuvent se rendre compte que l’impact le plus important de leur entreprise est indirect, à savoir l’eau potable utilisée par les fournisseurs et/ou les consommateurs.

  2. Mesurer et estimer les impacts sur la nature et les dépendances à l’égard de cette dernière. S'appuyer sur l’évaluation initiale de l’importance relative et réaliser leur propre évaluation du capital naturel en suivant le Protocole sur le capital naturel.. Trouver le bon outil pour évaluer les impacts et les dépendances grâce au kit de gestion du capital naturel et le cas échéant, suivre les conseils supplémentaires sur la finance, la biodiversité et les systèmes alimentaires. Prendre contact avec We Value Nature pour renforcer les compétences et les capacités tout au long de leur parcours de gestion du capital naturel.

  3. Évaluer les risques et les opportunités pour les entreprises en acquérant une compréhension de leurs impacts sur la nature et leurs dépendances à l’égard de cette dernière, en identifiant et en évaluant le risque lié à la nature de l’entreprise. Utiliser les conseils fournis par le Taskforce on Nature-related Financial Disclosures (TNFD) pour montrer comment l’organisation évalue et gère les risques liés à la nature. Identifier les lieux prioritaires pour définir les objectifs et les actions en utilisant des outils tels que l’outil IBAT Integrated Biodiversity Assessment Tool for Business et approfondir les risques particuliers et les opportunités identifiés, en utilisant par exemple le Filtre des risques associés à l’eau du WWF.

  4. Élargir les évaluations de manière à inclure la nature, le climat et les personnes : Si possible, mener une évaluation intégrée, qui porte sur le capital naturel, le capital social et humain ainsi que le capital produit. Mesurer, gérer et signaler les impacts sur le climat grâce au Protocole GES. Réaliser des évaluations des impacts et des dépendances pour cerner les conséquences pour les populations autochtones afin de garantir la protection de leurs droits.

Comment les entreprises et les institutions financières peuvent-elles déjà divulguer leurs impacts et leurs dépendances ?

Les entreprises et les institutions financières doivent assurer un suivi de leurs performances et se préparer à rendre publiques les informations importantes liées à la nature :

  1. Contrôler régulièrement les progrès réalisés, à une fréquence adaptée à la nature de leurs engagements. Par exemple, un suivi trimestriel peut être approprié pour certains objectifs tels que la consommation d’eau ou les rejets polluants, tandis qu’un suivi sur 3 à 5 ans peut être approprié pour d’autres objectifs tels que l’abondance des espèces.

  2. Rendre compte des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs positifs pour la nature et communiquer les résultats aux principales parties prenantes tout au long du processus. Le Taskforce on Nature-related Financial Disclosures (TNFD) recommande aux dirigeants d’entreprise de communiquer :

    • la gouvernance : la manière dont les fonctions de surveillance et de prise de décision de l’organisation prennent en compte les risques et les opportunités liés à la nature.

    • la stratégie : l’intégration des effets réels et potentiels des risques et opportunités liés à la nature sur le modèle d’entreprise, la stratégie et la planification financière de l’organisation.

    • la gestion du risque : comment l’organisation intègre les risques liés à la nature dans son approche globale de la gestion du risque.

    • les paramètres et les objectifs :  les indicateurs de performance quantitatifs et qualitatifs et objectifs liés aux risques et opportunités liés à la nature, en fonction des impacts sur la nature et des dépendances à l’égard de cette dernière.

  3. Divulguer chaque année par le biais du CDP : les entreprises doivent répondre chaque année aux questionnaires du CDP sur le changement climatique, les forêts et la sécurité de l’eau, qui couvrent un large éventail de paramètres liés à la nature. En tant que système de divulgation d’informations environnementales indépendant le plus important au monde, les questionnaires du CDP sont conformes aux cadres et normes de qualité les plus sévères, notamment le TCFD, le protocole GES et le mandat du PDG de l’ONU sur l’eau. À l’avenir, la plateforme de divulgation du CDP peut constituer un mécanisme permettant de transposer les recommandations du TNFD en questions sur la divulgation et fournir un format annuel standardisé. Les investisseurs et les déclarants disposent alors d’une plateforme unique qu’ils peuvent utiliser pour mettre le cadre TNFD en pratique dans le monde réel et les entreprises peuvent s’en servir pour se préparer à satisfaire aux exigences réglementaires à venir. 

  4. Chercher à obtenir une vérification et une validation indépendantedes processus pour renforcer la crédibilité des actions. Rechercher une validation et une vérification indépendantes pour garantir les processus de l’entreprise utilisés pour la cartographie de la chaîne de valeur, les évaluations de l’importance relative, la hiérarchisation des lieux d’action, la collecte des données initiales et la fixation des objectifs.

  5. Se conformer aux principales normes en matière de reporting pour publier le compte rendu. Dans la mesure du possible, assurer la mise en conformité aux normes existantes en matière de reporting, telles que le GRI, le SASB, l’IFC et la Directive européenne sur le reporting extra-financier.

Comment les entreprises peuvent-elles s’engager à éviter et à réduire les impacts négatifs ?

Les entreprises et les institutions financières peuvent fixer des objectifs transparents, limités dans le temps, spécifiques et fondés sur des données scientifiques, afin d’être en bonne voie d’opérer dans le respect des limites de la Terre. Pour plus d’informations, consultez la section « commit » (s’engager) de : High-Level Business Actions on Nature (Actions de haut niveau des entreprises sur la nature).

Elles peuvent s’inspirer en particulier des orientations initiales du Science-Based Targets for Nature (SBTN)  et de ses propositions d'objectifs intermédiaires et peuvent se préparer à fixer des objectifs conformes aux orientations finales qui seront publiées en 2023.

Comment les entreprises peuvent-elles transformer leurs stratégies pour restaurer et régénérer la nature ?

Les entreprises et les institutions financières peuvent éviter et réduire les impacts négatifs, restaurer et régénérer la nature et collaborer à la gestion durable des paysages terrestres et marins, transformer la stratégie et les modèles d’entreprise et plaider pour une politique ambitieuse. Pour plus d’informations, consultez la section « transform » (transformer) de: High-Level Business Actions on Nature (Actions de haut niveau des entreprises sur la nature).


[1] La législation européenne impose à certaines grandes entreprises de divulguer des informations sur la manière dont elles opèrent et gèrent les défis sociaux et environnementaux.

[2] Document d’information SBI-3 CBD/SBI/3/INF/27

[3] https://www.reuters.com/business/environment/g7-backs-making-climate-risk-disclosure-mandatory-2021-06-05/

[4] https://www.sec.gov/news/press-release/2022-46